Dans un pays marqué par une alternance fragile entre espoirs démocratiques et épisodes autoritaires, la Guinée se retrouve à un moment charnière. Depuis le coup d’État de septembre 2021, le général Mamadi Doumbouya avait promis un retour à l’ordre constitutionnel. Or, la suspension de trois principales formations d’opposition pour trois mois, à l’approche d’un scrutin déterminant, semble aller à contre-courant de ces engagements et met en doute la sincérité de la transition.
Trois partis historiques sont concernés : le Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG-Arc-en-Ciel) de l’ex-président Alpha Condé, l’Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG) de Cellou Dalein Diallo et le Parti du Renouveau et du Progrès (PRP) de Rafiou Sow. Le ministère de l’Administration territoriale invoque des manquements administratifs, tels que l’absence de congrès réguliers ou la non-transmission de comptes bancaires. Ces formations disposent de 90 jours pour se mettre en conformité, sans quoi elles risquent d’autres sanctions. Elles sont d’ores et déjà interdites de toute activité publique. Mais pour de nombreux observateurs, il s’agit surtout d’une stratégie visant à affaiblir l’opposition avant le référendum.
Au cœur des tensions se trouve en effet le projet de nouvelle Constitution, présenté comme une étape vers la restauration démocratique mais perçu comme un instrument de consolidation du pouvoir de la junte. La campagne référendaire, ramenée à seulement trois semaines à partir du 31 août, limite fortement la mobilisation citoyenne. L’un des points les plus controversés reste l’incertitude autour de la participation future des militaires au pouvoir à des élections, alors qu’une charte de transition leur interdisait initialement de briguer des mandats.
Ce référendum soulève ainsi plusieurs enjeux déterminants : la légitimité du processus électoral, la capacité des citoyens à s’exprimer librement, les ambitions politiques de la junte et la réaction de la communauté internationale, jusqu’ici prudente. Déjà, des partis et organisations de la société civile ont appelé à manifester dès le 5 septembre pour dénoncer une dérive autoritaire. À l’approche du 21 septembre, la Guinée se retrouve donc à la croisée des chemins. Si la transparence et l’inclusivité ne sont pas garanties, le processus risque de manquer de crédibilité et d’alimenter les tensions. Le scrutin à venir dira si le pays s’oriente vers une consolidation démocratique ou vers un nouveau cycle de répression.