Dans le Sahel, des groupes armés comme Boko Haram, l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP) ou le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) ont fait du vol de bétail un pilier de leur économie de guerre. Pour ces organisations, les troupeaux volés sont revendus sur des marchés transfrontaliers grâce à des réseaux bien structurés incluant intermédiaires, commerçants et transporteurs. Une étude de la GI-TOC révèle que certaines factions jihadistes peuvent engranger jusqu’à 30 millions de francs CFA par mois, soit environ 45 000 euros.
Le Mali et le Nigeria sont parmi les pays les plus touchés. En 2021, 130 000 têtes de bétail ont été volées au Mali, contre moins de 50 000 les années précédentes. La brutalité de ces opérations pousse de nombreux éleveurs à fuir, appauvris, brisés et parfois recrutés par les groupes mêmes qui les ont dépouillés.
Ce commerce alimente des tensions intercommunautaires explosives, exacerbant les violences ethniques et justifiant l’émergence de milices d’autodéfense. Malgré l’urgence, la coopération régionale reste fragile, surtout après la sortie du Mali, du Niger et du Burkina Faso de la CEDEAO. Assécher cette source de financement implique d’aller au-delà de l’approche sécuritaire : il faut casser les réseaux logistiques et commerciaux du bétail volé, tout en soutenant les communautés pastorales. Tant que le bétail restera une monnaie de guerre, la paix dans la région restera hors de portée.