La Tanzanie, célèbre pour sa biodiversité et ses paysages majestueux, est aujourd’hui au cœur d’une controverse majeure concernant les droits des Massaï, un peuple autochtone dont les terres ancestrales sont menacées par des expulsions forcées. Depuis plusieurs années, les autorités tanzaniennes ont mis en œuvre des politiques qui ont conduit à l’éviction de milliers de familles massaï de leurs terres, justifiant ces actions par des préoccupations environnementales et touristiques. Cependant, cette situation est largement critiquée par des ONG et des défenseurs des droits de l’homme, qui dénoncent des pratiques abusives et un mépris flagrant des droits humains.
Les Massaï, un peuple semi-nomade, vivent dans la région de Ngorongoro et à Loliondo, où ils ont établi leurs communautés depuis des générations. Leur mode de vie est intrinsèquement lié à la terre qu’ils habitent, qu’ils utilisent pour le pâturage de leur bétail et pour leur subsistance. Cependant, depuis 1959, le gouvernement tanzanien a régulièrement déplacé les Massaï, souvent sous prétexte de conservation de la faune sauvage ou de développement touristique. Ce processus s’est intensifié ces dernières années, avec des expulsions massives qui ont laissé des milliers de personnes sans abri ni ressources.
Les expulsions récentes
En juin 2022, Amnesty International a publié un rapport accablant sur les expulsions à Loliondo, où les forces de sécurité ont utilisé une violence excessive pour déloger les Massaï de 1 500 kilomètres carrés de leurs terres. Selon Tigere Chagutah, directeur régional pour l’Afrique de l’Est à Amnesty, « les autorités tanzaniennes ont employé une force brutale afin d’expulser les Massaïs, méprisant totalement les procédures légales et le consentement des communautés concernées« . Ces expulsions ont été justifiées par le gouvernement comme nécessaires pour protéger la faune sauvage, mais de nombreux observateurs affirment qu’elles visent principalement à ouvrir la voie à des projets touristiques lucratifs, notamment la chasse aux trophées.
Réactions des ONG et des défenseurs des droits
Les ONG, y compris Human Rights Watch et Amnesty International, ont exprimé leur indignation face à ces expulsions. Les experts de l’ONU ont également averti que ces actions pourraient constituer des violations graves des droits humains, en qualifiant les expulsions de « dépossession » et de « déplacement arbitraire« . Joseph Oleshangay, avocat et militant des droits de l’homme, a déclaré : « Cette expulsion n’a jamais été volontaire pour les habitants de Ngorongoro« . Les Massaï, qui ont vu leur population croître de manière exponentielle, se retrouvent en concurrence avec les initiatives de conservation qui privilégient les intérêts économiques au détriment de leurs droits fondamentaux.
Une question de culture et d’identité
Au-delà des enjeux économiques et environnementaux, cette situation soulève des questions cruciales sur la préservation de la culture massaï. Les Massaï ont une riche tradition culturelle qui est intimement liée à leur mode de vie pastoral. Les expulsions menacent non seulement leur existence physique, mais aussi leur identité culturelle. Comme l’a souligné un rapport d’Amnesty, « la perte de terres ancestrales équivaut à une perte d’identité et de culture pour les Massaï« .
Le gouvernement tanzanien, tout en affirmant qu’il n’y a pas d’expulsions prévues, a intensifié sa présence policière dans les zones massaï et a gelé le financement des infrastructures publiques, créant ainsi des conditions de vie insoutenables pour forcer les habitants à quitter leurs terres. Le Premier ministre Kassim Majaliwa a assuré que « toutes les personnes qui partent se sont inscrites volontairement« , mais cette déclaration est largement contestée par les communautés locales et les défenseurs des droits de l’homme.
Perspectives d’avenir
La lutte des Massaï pour leurs droits fonciers et culturels est loin d’être terminée. Les tensions entre les communautés locales et le gouvernement continuent de croître, alimentées par des incidents violents et des confrontations avec les forces de sécurité. Les organisations de défense des droits de l’homme appellent à une intervention internationale pour protéger les droits des Massaï et garantir leur accès à leurs terres ancestrales.
La situation en Tanzanie est un exemple frappant des défis auxquels sont confrontées de nombreuses communautés autochtones à travers le monde, où les intérêts économiques et environnementaux entrent souvent en conflit avec les droits fondamentaux des peuples autochtones. Les Massaï, avec leur riche héritage culturel et leur lien indéfectible avec la terre, méritent d’être entendus et protégés dans leur lutte pour la justice et la dignité.
Sources : https://www.rfi.fr/fr/afrique/20240809-la-tanzanie-a-expuls%C3%A9-des-milliers-de-familles-massa%C3%AF-de-leurs-terres-ancestrales-des-ong-pointent-des-tactiques-abusives https://fr.news.yahoo.com/tanzanie-expuls%C3%A9-milliers-familles-massa%C3%AF-123317525.html https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2023/06/tanzania-authorities-brutally-violated-maasai-amid-forced-evictions-from-ancestral-lands/ https://www.geo.fr/environnement/tanzanie-debut-dune-operation-de-relocalisation-de-massai-de-ngorongoro-210418