Le gouvernement malien a décidé de rompre ses relations diplomatiques avec l’Ukraine, accusant ce pays d’être impliqué dans une lourde défaite de l’armée malienne et du groupe paramilitaire russe Wagner lors de récents combats contre des séparatistes et des jihadistes dans le nord du pays. Fin juillet, des affrontements ont eu lieu près de Tinzaouatène, à la frontière algérienne. Les séparatistes et les jihadistes ont affirmé avoir tué des dizaines de membres du groupe Wagner et de soldats maliens. C’est la plus lourde défaite subie par Wagner en Afrique lors d’une seule bataille, selon les analystes.
Le porte-parole du gouvernement malien, le colonel Abdoulaye Maïga, a déclaré que le Mali avait « pris connaissance, avec une profonde stupeur, des propos subversifs » d’Andriy Yusov, porte-parole de l’agence ukrainienne de renseignement militaire. Ce dernier avait avoué l’implication de l’Ukraine dans une « attaque lâche, traître et barbare » contre les forces maliennes et russes. M. Yusov avait affirmé que les rebelles avaient reçu des informations cruciales pour mener leurs attaques. Le gouvernement malien juge que ces actes « violent la souveraineté du Mali, dépassent le cadre de l’ingérence étrangère, et constituent un soutien au terrorisme international« .
Le Mali a annoncé qu’il allait saisir les autorités judiciaires et prendre des « mesures nécessaires pour prévenir toute déstabilisation« , notamment en surveillant les ambassades ukrainiennes dans la région. Le Sénégal, qui avait convoqué l’ambassadeur d’Ukraine pour avoir publié une vidéo de soutien aux attaques, a aussi condamné cette « propagande médiatique« . La junte au pouvoir depuis 2020 a multiplié les actes de rupture avec la France et ses partenaires européens, pour se tourner militairement et politiquement vers la Russie. Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a réaffirmé cette semaine son soutien à Bamako.
Les groupes armés séparatistes ont perdu depuis 2023 le contrôle de plusieurs localités du Nord, après une offensive de l’armée malienne qui a culminé par la prise de Kidal, bastion de la revendication indépendantiste. C’est un enjeu de souveraineté majeur pour l’Etat central. En rompant ses relations avec l’Ukraine, le Mali accentue son alignement sur la Russie et durcit le ton contre toute ingérence étrangère, au moment où l’armée tente de reprendre le contrôle du Nord. Les accusations contre l’Ukraine, si elles sont avérées, montrent l’ampleur de l’implication russe et les risques de déstabilisation régionale.