Le 16 septembre 2025, la Haute Cour de Nairobi a ordonné l’arrestation d’un ex-militaire britannique soupçonné d’être impliqué dans le meurtre commis en 2012. Le Bureau kényan du directeur des poursuites publiques (ODPP) a confirmé l’ouverture d’une procédure d’extradition, une première dans l’histoire judiciaire du pays. Si elle aboutit, ce serait la première fois qu’un soldat britannique est extradé pour répondre d’un crime commis à l’étranger. L’affaire reviendra devant la justice kényane le 21 octobre prochain pour de nouvelles instructions. Agnes Wanjiru, coiffeuse et mère d’une petite fille, avait été vue pour la dernière fois en compagnie de soldats britanniques à Nanyuki en mars 2012.
Son corps, découvert deux mois plus tard dans la fosse septique d’un hôtel, portait les traces de coups de couteau et de sévices. En 2018, un inquest avait conclu à son assassinat par un ou plusieurs soldats britanniques, sans qu’aucune poursuite ne soit engagée. Ce n’est qu’en 2021, après des révélations du Sunday Times faisant état d’un aveu d’un militaire à ses camarades, que l’enquête a été relancée. La présence militaire britannique au Kenya, concentrée autour de la base de Nanyuki, a souvent été source de tensions. Depuis les années 1960, plusieurs accusations de violences et d’agressions sexuelles pèsent sur des soldats déployés dans la région. L’affaire Wanjiru, emblématique de cette impunité dénoncée depuis des décennies par les organisations de défense des droits humains, ravive ce contentieux historique.
Pour la famille de la victime, l’annonce du mandat d’arrêt est un soulagement mêlé d’amertume. « Nous avons attendu ce moment plus de dix ans », a confié sa sœur Rose Wanyua Wanjiku. L’avocate de la famille, Tessa Gregory, a exhorté Londres à coopérer pleinement avec Nairobi pour que justice soit rendue. Le gouvernement britannique a reconnu la décision de la justice kényane et assuré de son engagement à accompagner l’enquête, sans toutefois commenter les procédures en cours. Au-delà d’un simple dossier criminel, cette affaire constitue un jalon majeur pour l’indépendance judiciaire du Kenya et la lutte contre l’impunité. Treize ans après le drame, elle envoie un signal fort : aucun crime, aussi ancien soit-il, ne doit rester impuni, même lorsqu’il implique des acteurs liés à des puissances étrangères.