L’Afrique possède un immense potentiel culturel. Du cinéma à la mode en passant par la musique ou les arts numériques, les ICC peuvent devenir un levier stratégique de développement. Pourtant, l’évolution de ce secteur varie considérablement selon les pays. Tandis que les nations anglophones bâtissent de véritables industries culturelles compétitives, de nombreux pays francophones peinent encore à structurer leur écosystème créatif. Le Nigeria en est l’exemple phare. En 2024, Nollywood a généré ₦11,5 milliards de revenus (environ 4,5 milliards FCFA), un chiffre en hausse de 60 %. Au premier trimestre 2025, le box-office nigérian a déjà atteint ₦3,48 milliards. Le film Everybody Loves Jenifa est devenu un phénomène national. Le secteur des médias et divertissements y a contribué à hauteur de N1,97 trillions au PIB en 2023 et PwC prévoit des recettes de 13,6 milliards USD d’ici 2028. Le Kenya et l’Afrique du Sud ne sont pas en reste. Hubs technologiques, plateformes de streaming locales, dispositifs fiscaux avantageux et formations spécialisées participent à un environnement propice à l’émergence d’une économie créative durable.

À l’inverse, les pays francophones comme la Côte d’Ivoire, le Sénégal ou le Burkina Faso disposent d’un vivier artistique indéniable, mais leurs industries restent souvent informelles. Les bureaux de gestion des droits d’auteur manquent d’efficacité, les politiques publiques sont peu cohérentes et le financement repose encore majoritairement sur l’aide extérieure (AFD, Union européenne, Institut français). La barrière linguistique constitue également un frein. L’anglais, langue dominante sur les plateformes numériques mondiales, offre aux pays anglophones une visibilité accrue. Peu d’œuvres francophones parviennent à percer à l’échelle internationale sans traduction ou accompagnement stratégique.
Une comparaison révélatrice
Indicateur | Pays anglophones | Pays francophones |
---|---|---|
Contribution au PIB | Jusqu’à 5–6 % | En moyenne <2 % |
Financement | Investissements privés, capital-risque | Fonds publics, aides internationales |
Structuration | Hubs, incubateurs, universités | Festivals, structures peu pérennes |
Exportation | Présence internationale forte | Visibilité mondiale limitée |
Cadre juridique | Lois modernes sur la PI | Législations peu appliquées |
La créativité africaine n’a pas de frontières linguistiques, mais son développement économique, lui, en connaît. L’avance prise par les pays anglophones tient autant à des choix politiques audacieux qu’à un meilleur arrimage aux marchés mondiaux. Pour combler cet écart, les pays francophones doivent cesser de considérer la culture comme un simple vecteur symbolique et l’intégrer pleinement dans leurs stratégies économiques. Investir dans la formation, sécuriser les droits d’auteur, encourager l’innovation et faciliter l’accès aux financements privés sont autant de leviers pour bâtir des ICC robustes. L’Afrique gagnerait à unifier ses dynamiques créatives pour peser davantage sur la scène culturelle mondiale.
Sources : https://www.vanguardngr.com/2025/01/nigerian-box-office-records-n11-5bn-revenue-achieves-60-growth-in-2024/ https://taluko.com/nollywood-revenue-surges-to-%E2%82%A63-48-billion-in-q1-2025/ https://africafashiontour.com/les-industries-creatives-africaines-le-pari-dune-transformation-globale/ https://majoiemagazine.com/les-industries-culturelles-et-creatives-en-afrique-moteurs-de-developpement-et-dinnovation/