Libreville – Le 28 juin 2025, le président gabonais Brice Clotaire Oligui Nguema lancera officiellement sa formation politique au Palais des Sports de Libreville. Cette décision marque un tournant majeur pour un chef d’État qui, jusqu’ici, revendiquait sa distance avec les logiques partisanes.
Lors de sa prise de pouvoir après le coup d’État d’août 2023, puis lors de l’élection présidentielle de 2024, Oligui Nguema affirmait ne pas vouloir incarner un homme politique au sens classique. Son élection s’était faite sans étiquette déclarée, sur la promesse d’un leadership de transition et de rupture. Aujourd’hui, ce choix d’assumer une identité partisane rebat les cartes.
Ce changement, bien qu’inattendu pour certains, reste dans la lignée d’une tradition politique gabonaise où le pouvoir s’appuie sur sa propre machine partisane. Selon plusieurs sources, le président aurait été convaincu par ses proches et des vétérans de la politique de la nécessité d’un parti pour renforcer sa position et structurer sa base.
La légalité de cette initiative suscite toutefois des débats. La Constitution de 2024 n’interdit pas explicitement au président de fonder un parti, mais l’article 32 suggère une posture de neutralité. Le juriste Camille Lendeme rappelle que l’article 82 du Code électoral pourrait poser problème : il impose une continuité entre la posture politique lors de la candidature et l’exercice du mandat. Élu comme indépendant, Oligui Nguema risque ainsi de voir sa démarche interprétée comme une rupture de cet engagement implicite.

Cette annonce intervient dans un contexte législatif tendu. Le 17 juin, une nouvelle loi encadrant les partis politiques a été adoptée. Elle impose des conditions strictes : 12 000 signatures avec NIP, une couverture nationale et une transparence financière rigoureuse. Des conditions jugées dissuasives pour les formations émergentes, mais largement favorables au Rassemblement des Bâtisseurs (RdB), structure lancée en mars et déjà forte de 22 000 membres. Certains observateurs parlent d’un « cadre législatif sur mesure » pour institutionnaliser un parti présidentiel dominant.
L’adhésion de plusieurs figures de l’ancien Parti Démocratique Gabonais (PDG), dont Paul Biyoghé Mba et Daniel Ona Ondo, accentue les interrogations. Critiqués lors de la chute du régime Bongo, leur retour interroge sur la volonté réelle de renouvellement du système politique. Le 28 juin, Oligui Nguema passera d’un président sans étiquette à un chef de parti. Ce virage partisan pourrait façonner durablement l’équilibre politique du Gabon, pour le meilleur ou pour la continuité du système qu’il disait vouloir dépasser.
Sources : https://www.lenouveaugabon.com/politique/1806-12345 https://www.union.ga/actualites/2106-45678 https://gabonactu.com/2025/06/22/lendeme-analyse/