En Tunisie, à quelques semaines de la présidentielle prévue le 6 octobre 2024, la situation politique devient de plus en plus complexe. Le tribunal administratif a validé, le 29 août 2024, la candidature de Mondher Zenaidi, ancien ministre sous le régime de Zine El Abidine Ben Ali, après que l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) avait rejeté sa candidature. Cette décision marque un tournant dans une élection qui s’annonce déjà pleine de rebondissements.
La Décision du Tribunal
L’ISIE, qui est responsable de l’organisation et de la supervision des élections, n’avait initialement retenu que trois candidatures, dont celle du président sortant Kaïs Saïed. Ce dernier, en poste depuis 2019, a été accusé de dérives autoritaires, notamment après avoir pris des mesures qui ont consolidé son pouvoir en juillet 2021. Les deux autres candidats validés par l’ISIE sont Zouhair Maghzaoui et Ayachi Zammel, ce qui laisse la porte ouverte à des interrogations sur la transparence du processus électoral. La décision du tribunal administratif de réintégrer Mondher Zenaidi dans la course présidentielle est significative. En acceptant son recours, le tribunal a non seulement annulé la décision de l’ISIE, mais a également réaffirmé son indépendance face à un pouvoir exécutif souvent critiqué pour son emprise sur les institutions. Le porte-parole du tribunal a déclaré que celui-ci avait « accepté sur la forme et le fond le recours déposé par Mondher Zenaidi » et annulé la décision initiale de l’ISIE.
Cette décision fait suite à celle du 27 août, où le tribunal avait également réintégré Abdellatif Mekki, un ancien dirigeant d’Ennahdha, un mouvement islamo-conservateur. Ces deux décisions sont perçues comme un camouflet pour l’ISIE, qui avait invalidé au total 14 candidatures sur 17.
Profil de Mondher Zenaidi
Mondher Zenaidi, âgé de 73 ans, est un ingénieur de formation qui a occupé plusieurs ministères sous le régime de Ben Ali, notamment ceux du Commerce, des Transports, du Tourisme et de la Santé. Actuellement exilé en France, il s’exprime régulièrement par le biais de vidéos sur les réseaux sociaux, appelant à l’apaisement et à la réconciliation nationale. Son discours contraste fortement avec celui de Kaïs Saïed, qui se concentre sur des thématiques de sécurité nationale et de complots. Zenaidi est considéré comme un candidat sérieux, capable de capter une partie des voix des opposants au président sortant, notamment des électeurs de gauche et des partisans de l’ancien régime. Sa candidature pourrait également séduire des électeurs du Parti destourien libre (PDL), dont la dirigeante, Abir Moussi, est actuellement en prison pour des accusations de « complot contre la sûreté de l’État » et d’autres infractions.
Implications pour l’Élection
La validation de la candidature de Zenaidi pourrait bouleverser la dynamique électorale. Alors que Kaïs Saïed semble avoir un avantage en tant qu’incumbent, l’entrée de candidats comme Zenaidi et Mekki pourrait offrir une alternative significative aux électeurs. Le tribunal administratif a ainsi envoyé un message fort sur l’indépendance de la justice, un aspect crucial dans un pays où la séparation des pouvoirs est souvent remise en question. À l’approche de la campagne officielle, qui débutera le 14 septembre, les tensions politiques risquent de s’intensifier. Les observateurs s’interrogent sur la manière dont l’ISIE réagira à ces décisions judiciaires et si elle respectera la volonté du tribunal en publiant une liste définitive de candidats conforme à la légalité.
La présidentielle tunisienne de 2024 s’annonce comme un moment charnière pour la démocratie dans le pays. Avec la validation de la candidature de Mondher Zenaidi, la scène politique tunisienne est en pleine mutation. Les prochaines semaines seront cruciales pour déterminer si la justice continuera à jouer un rôle d’arbitre face à un pouvoir exécutif de plus en plus contesté. La population tunisienne, déjà fatiguée par des années de turbulences politiques, attend avec impatience de voir comment ces événements influenceront l’avenir de leur pays.
Sources : https://www.rfi.fr/fr/afrique/20240830-pr%C3%A9sidentielle-en-tunisie-la-justice-valide-la-candidature-de-mondher-zenaidi-cinqui%C3%A8me-pr%C3%A9tendant
https://www.jeuneafrique.com/1603253/politique/election-presidentielle-en-tunisie-la-justice-administrative-autorise-la-candidature-de-mondher-zenaidi/
https://fr.apanews.net/news/presidentielle-en-tunisie-la-justice-autorise-la-candidature-de-mondher-zenaidi/ https://www.france24.com/fr/afrique/20240829-tunisie-l-ancien-ministre-mondher-zena%C3%AFdi-r%C3%A9int%C3%A9gr%C3%A9-par-la-justice-dans-la-course-pr%C3%A9sidentielle https://www.jeuneafrique.com/1603742/politique/presidentielle-tunisienne-finalement-ils-seront-six/