Le président tunisien, Kaïs Saïed, a récemment effectué un remaniement ministériel majeur, remplaçant 19 ministres et 3 secrétaires d’État à seulement six semaines des élections présidentielles prévues pour le 6 octobre 2024. Cette décision, annoncée le 25 août 2024, a été qualifiée de surprise, le président ne fournissant aucune explication officielle pour ces changements. Ce remaniement fait suite à une série de décisions controversées prises par Saïed depuis son accession au pouvoir en 2019. En effet, le président a déjà limogé le Premier ministre Ahmed Hachani le 8 août sans le remplacer, consolidant ainsi son contrôle sur le gouvernement. Parmi les nouveaux ministres, Mohamed Ali Nafti a été nommé ministre des Affaires étrangères, tandis que Khaled Shili a pris la tête du ministère de la Défense. Ce dernier avait précédemment été un diplomate et un haut fonctionnaire au ministère des Affaires étrangères, ce qui soulève des questions sur la continuité et la stabilité de la politique étrangère tunisienne.
Contexte politique tendu
Kaïs Saïed, qui s’est octroyé les pleins pouvoirs lors d’un coup de force en juillet 2021, est accusé par ses détracteurs de dérive autoritaire. Dans ce contexte, il brigue un second mandat présidentiel, se présentant comme un leader engagé dans une « guerre de libération et d’autodétermination » visant à « établir une nouvelle république ». Cependant, les conditions entourant cette élection soulèvent des inquiétudes quant à la légitimité du processus électoral. Human Rights Watch a dénoncé un climat de « répression croissante » à l’approche du scrutin, affirmant qu’ « au moins huit candidats potentiels ont été poursuivis en justice, condamnés ou emprisonnés », les empêchant de se présenter. Parmi ces candidats figurent des figures de l’opposition, telles que Issam Chebbi et Abir Moussi, qui ont exprimé leurs préoccupations concernant les entraves administratives à leur participation.
Réactions et implications
Les analystes politiques s’interrogent sur les motivations derrière ce remaniement à la veille des élections. Certains voient cela comme une tentative de Saïed de renforcer son pouvoir en s’entourant de loyalistes, tandis que d’autres y voient un signe de panique face à une opposition grandissante. Dans un communiqué, le directeur adjoint de la division Moyen-Orient/Afrique du Nord pour HRW, Bassam Khawaja, a déclaré : « Après avoir emprisonné des dizaines d’opposants et de militants de renom, les autorités ont écarté presque tous les concurrents sérieux de la course à la présidence, réduisant cette élection à une simple formalité. » Le remaniement ministériel pourrait également avoir des répercussions sur la politique intérieure et la gestion des crises économiques et sociales que traverse le pays. La Tunisie fait face à des défis économiques majeurs, avec un taux de chômage élevé et une inflation galopante, ce qui rend la situation encore plus délicate pour le nouveau gouvernement.
Alors que la Tunisie se prépare pour des élections cruciales, le remaniement ministériel de Kaïs Saïed soulève des questions sur l’avenir démocratique du pays. Les changements à la tête du gouvernement, couplés à un environnement politique répressif, laissent présager une élection marquée par des tensions et des incertitudes. Les mois à venir seront décisifs pour la Tunisie, alors que le peuple tunisien aspire à un avenir meilleur dans un contexte de crise persistante.
Sources : https://www.liberation.fr/international/afrique/tunisie-a-un-mois-de-la-presidentielle-kais-saied-procede-a-un-vaste-remaniement-ministeriel-20240825_7CLOWRFQ4RATXKJ5M552O4BPZE/
https://www.aa.com.tr/fr/monde/tunisie-le-pr%C3%A9sident-sa%C3%AFed-proc%C3%A8de-%C3%A0-un-vaste-remaniement-minist%C3%A9riel/3312963 https://lapresse.tn/2024/08/26/remaniement-ministeriel-kais-saied-aux-nouveaux-membres-du-gouvernement-limmobilisme-des-rouages-de-letat-et-le-souci-de-preservation-de-la-securite/
https://fr.africanews.com/2024/08/26/tunisie-kais-saied-procede-a-un-remaniement-ministeriel-a-quelques-semaines-de-la-presiden/